Dans un précédent article qui abordait les liens entre persévérance scolaire et bien-être, nous nous sommes basés sur la définition de l’OMS au sujet du bien-être. 

L’approche proposée par l’organisation internationale abordait un point relatif au bien-être émotionnel avec la définition suivante : aptitude à faire preuve de résilience, à gérer ses émotions et à ressentir des émotions sources de sentiments positifs”. 

Il est donc indispensable de penser l’environnement éducatif dans un cadre qui favorise le développement de ce bien-être émotionnel. Un des principaux leviers pour accompagner tous les élèves vers plus d’épanouissement, et pour aider ceux faisant face à des difficultés à les surmonter.

L’impact du Bien-Être émotionnel sur la persévérance scolaire

Lorsque les élèves se sentent en confiance et soutenus, leur engagement envers les apprentissages  est renforcé, contribuant ainsi à une persévérance scolaire plus durable et positive. 

Si l’on fait un retour étymologique sur le mot émotion, voici ce qu’il en ressort : 
Émotion vient de “motere” qui vient du latin bouger et suggère que dans chaque émotion, il y a une action.

La manifestation des émotions s’effectue souvent par des réactions engageant le corps et l’esprit.

Un des piliers de cette quête du bien-être multidimensionnel est la capacité pour l’être humain à développer sa résilience et sa réaction face aux épreuves. Ainsi, on peut appréhender le bien-être émotionnel dans le cadre scolaire comme une éducation à la résilience. Quels outils peut-on transmettre aux élèves pour améliorer ce bien-être à l’école ? Et donc comment peut-on les accompagner pour qu’ils fassent preuve de résilience ? 

Bien entendu ces questions sont très vastes et à envisager individuellement selon les profils des élèves et les parcours individuels qu’ils ont à la fois scolairement et socialement. Les accompagnements de chacun seront possibles grâce à la mise en place d’une pédagogie différenciée qui répond à l’hétérogénéité des salles de classes.

Nous pouvons aussi aborder des mécanismes qui instaurent un bien-être émotionnel collectif, car n’oublions pas que le bien-être à l’école est une affaire de société et donc le résultat d’un engagement commun ! 

Être “émotionnellement compétent”, un pilier de la persévérance scolaire 

Plusieurs études établissent le lien entre les résultats scolaires des élèves et la manière dont ils appréhendent leurs émotions. Un article qui recoupe plusieurs de ces études, proposé par la Revue Raisons Éducatives (2021, Sylvie Richard, Philippe Gay, Édouard Gentaz) se concentre sur les résultats observés auprès de groupes d’élèves âgés de 4 à 7 ans. 

Quelles observations nous sont proposées ? L’article est très fourni et nous vous invitons à le consulter mais voici quelques points intéressants pour mener notre réflexion :  

  • “L’étude de Cavadini, Richard, Dalla-Libera, et Gentaz conduite auprès de 706 élèves âgés de 3 à 6 ans révèle notamment que de bonnes capacités à comprendre les émotions contribuent à de meilleures performances scolaires en mathématiques.”
  • Les compétences émotionnelles sont cruciales pour permettre aux élèves d’interagir et de former des relations avec les autres (Denham, 1998 ; McLaughlin, Aspden, & Clarke, 2017 ; Raver, 2002 ; Saarni, 1990). 
  • Les élèves possèdent leurs émotions à 5 ans et plus spécifiquement la capacité à détecter et labelliser les signaux émotionnels facilite les interactions sociales positives et prédit leurs habiletés sociales et leurs performances académiques à 9 ans (Izard, Fine, Schultz, Mostow, Ackerman, et Yougstom, 2001) Les études démontrent l’importance du bien-être émotionnel
  • Les élèves présentant de meilleures compétences émotionnelles arrivent à mieux appréhender et gérer les émotions négatives comme l’anxiété, l’ennui ou la déception (MacCann, 2020) 

Ainsi, la nécessité de créer un climat positif alliée à la manière d’accompagner différemment les élèves ayant tendance à ressentir plus d’émotions négatives s’impose. 

 Accompagner les élèves face aux émotions négatives

Supprimer l’anxiété du quotidien d’un élève – ou de tout être humain d’ailleurs – est complexe mais ce qui est possible, c’est l’aider à mieux la gérer et à la maîtriser ! 

Tout au long de leur scolarité, les élèves ressentent des périodes de stress plus ou moins intenses à des degrés différents et avec des conséquences variables selon les profils. Comme mentionné plus haut, les enfants qui ont tendance à adopter une attitude positive et à avoir une bonne gestion émotionnelle réussiront  à surmonter ces périodes plus facilement.

À cette anxiété croissante peuvent se greffer des sentiments de honte, la peur d’être jugé ou de ne jamais y arriver. Il est donc primordial de créer des environnements où le positif prime en : 

  • Créant une dynamique globale qui favorise avant tout les interactions entre élèves mais aussi élèves-professeurs
  • Accompagnant les élèves vers une connaissance et une découverte constante de leurs émotions. C’est notamment ce que propose notre partenaire SoftKids avec le développement de compétences psychosociales. 

Développons ces points en nous appuyant sur des stratégies proposées par la recherche internationale. 

Favoriser le Bien-Être émotionnel des élèves

Plusieurs pistes sont proposées par les chercheurs dans différentes disciplines. Un point ressort c’est la corrélation entre émotion et cognition. Comment faire travailler les capacités émotionnelles et cognitives d’un élève, peuvent-elles lui permettre de s’épanouir scolairement et de manière plus globale ? 

Dans un article sur la place des émotions dans la formation enseignante, la chercheuse Catherine Audrin propose un tour d’horizon historique et idéologique des liens entre cognition et émotion dans l’éducation. Elle observe l’introduction de cette liaison à partir des années 1990 et précise que dès les années 2000 “le répertoire émotionnel est devenu central l’étude des processus d’apprentissage”. Une nouvelle vision possible notamment avec le travail d’Antonio Damasio sur les émotions et le rapport à l’erreur cartésien. En approfondissant, le chercheur italien explique la dynamique qui s’opère dans le cerveau et qui lie les réponses émotionnelles au processus cognitif. Car d’après ses recherches, tout événement peut être associé à des réactions somatiques positives ou négatives. L’association se fait par une connexion “entre les aires somatosensorielles et le cortex ventromédial préfrontal, région centrale dans la prise de décision”. 

Ces observations nous permettent de comprendre une fois de plus l’importance des émotions dans le développement des élèves. Alors faisons de nos émotions une force et transmettons leurs importances aux nouvelles générations ! 

Technologies et développement émotionnel

L’utilisation des nouvelles technologies et des écrans dans l’éducation provoquent des débats et sont parfois considérés comme des outils qui perturberaient la concentration des élèves, mais si la EdTech était porteuse de quelques solutions dans le développement émotionnel des élèves ? 

C’est une des grandes questions à laquelle notre consortium s’efforce de répondre et d’explorer notamment avec son partenaire Reverto qui propose le développement de l’empathie chez les élèves avec la réalité virtuelle. L’empathie est essentielle au développement des émotions et du bien-être qui en découle comme nous le rappelle le psychologue Carl Rogers ce « processus d’entrée dans le monde perceptif d’autrui” nous permet d’avancer ensemble. 

Par ailleurs, l’utilisation de la Réalité Virtuelle peut représenter une approche ludique pour les élèves qui vont développer des compétences de concentration mais aussi découvrir un outil qui fait partie intégrante du monde actuel et des mutations qu’il connaît. 

Développer un espace dédié à la gestion des émotions 

En parcourant la multitude de ressources sur la question , nous avons découvert une belle initiative portée par une professeure documentaliste de l’Académie de Toulouse. Christine Vertès développe le CDI du collège où elle enseigne afin d’en faire un lieu où les élèves peuvent développer les émotions. Elle propose une approche en 4 temps, un pour chaque année du collège et un grand nombre de ressources sous plusieurs formes pour les accompagner dans la découverte du spectre émotionnel. 

Créer un tel espace dans un établissement peut s’avérer particulièrement bénéfique et être un lieu où les élèves se rendent en sachant qu’ils s’y sentiront bien. Cet endroit peut donner lieu à un grand nombre d’ateliers, de discussions et permettre l’introduction de pratique comme la méditation, utile pour soulager l’anxiété. 

 Et les enseignants ?

Le bien-être émotionnel des enseignants est intrinsèquement lié à celui des élèves. Afin d’opérer des changements de fond dans le paysage éducatif et l’améliorer positivement, nous devons aussi améliorer le ressenti des enseignants. Un enseignant qui se sent bien, c’est un enseignant qui créera plus facilement un environnement positif pour ses élèves. Il est donc nécessaire de mettre en place des espaces où les enseignants peuvent aussi développer leurs émotions. Le travail mené par la Revue Raisons Éducatives liste deux types de méthodes pour les enseignants : indirectes et directes. 

Les méthodes indirectes sont notamment les suivantes : 

  • La posture que l’enseignant choisit d’avoir face à ses propres émotions. Il peut la définir en se posant la question suivante, par exemple : Est-ce que je montre mes émotions en classe ? En fonction de son comportement, il est nécessaire qu’il analyse la réaction de ses élèves pour savoir s’ il doit ajuster cela ou non. Ce point se base sur le travail de Ahn & Stifer, 2006.
  • Les enseignants peuvent appliquer plusieurs méthodes pour faire eux aussi face à l’anxiété que représente le travail d’une année scolaire. Ils peuvent s’appuyer sur des exercices de relaxation (Jacobson, 1938)  à introduire quotidiennement entre les temps scolaires. Et se détendre avec des programmes d’entraînement attentionnel ou de pleine conscience (Flook, Goldberg, Pinger, Bonus, & Davidson, 2013 ; Roeser, et al., 2013)

Les méthodes directes à appliquer auprès des élèves : 

  • La “labellisation des émotions” où ici dire et verbaliser ses émotions permet de les accepter et d’avancer avec plus sereinement. L’enseignant incite l’élève à mettre des mots sur ses maux et plus souvent, on espère, sur ce qui le réjouit.
  • L’article poursuit et insiste sur l’importance des conversations. Dans cette quête complexe qu’est le bien-être à l’école, la parole reste centrale. Inviter l’élève à parler de ses émotions, c’est l’aider à les confronter et donc à mieux les connaître. Les conversations peuvent se structurer autour des 3 points suivants : la description des émotions, les causes et les conséquences qu’elles ont et les questionnements qu’elles suscitent. 
  • “Faire semblant” pour développer le bien-être émotionnel de l’élève est une autre des pistes mentionnées ici qui nous fait penser aux ateliers de théâtre qui sont introduits dans les programmes scolaires. Mettre en place des situations imaginaires peut permettre à l’élève d’oser découvrir des émotions qu’il évite tout en lui permettant de développer des compétences émotionnelles. 

Vers un bien-être émotionnel à l’école : un travail d’équipe 

Imaginer un monde où tous les adultes se remémorent positivement leurs années à l’école nous pousse à conclure que le bien-être émotionnel à l’école ne se limite pas à cet environnement, mais qu’il revêt une dimension sociétale significative.

Afin de nourrir la persévérance scolaire, il est fondamental de travailler sur le développement émotionnel de chaque élève et de lui proposer peu importe la trajectoire de vie qu’ils auront, des outils qui favorisent son l’épanouissement émotionnel et la résilience. 

Ensemble construisons des espaces éducatifs où les élèves se sentent Bien à l’École ! 

Commentaires